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Disparitions tragiques de migrants en mer — Importance des règles de l’UE en matière de migration et d’asile

Old shoe on a beach
Engdao © adobestock.com, 2019
L’effroyable noyade de centaines de migrants, survenue la semaine dernière dans les eaux situées au large de la Grèce, nous rappelle, une fois de plus, qu’il est urgent de réviser les règles de l’UE en matière de migration et d’asile. À l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (FRA) réitère son appel en faveur de recherches et de sauvetages en mer plus efficaces, au moyen du renforcement de la protection des survivants de naufrages, et de la garantie d’une entrée légale sûre pour les migrants et les réfugiés.

« Je suis indigné par la récente tragédie en mer, qui fait craindre la disparition de plus de 500 personnes, dont de nombreux enfants », déclare Michael O’Flaherty, directeur de la FRA. « L’UE et ses États membres doivent s’acquitter de leur obligation première de protéger et de sauver des vies en mer. En se montrant à la hauteur des défis immédiats et à long terme que pose la migration, l’Europe peut donner de l’espoir aux personnes exilées tout en respectant le droit des réfugiés et le droit à la vie. »

Le droit européen prévoit de nombreuses garanties pour la protection des droits fondamentaux des migrants aux frontières, mais celles-ci doivent être mieux connues, expliquées et appliquées.

La FRA et le Conseil de l’Europe ont publié divers documents pour aider les professionnels à appliquer ces garanties aux frontières et dans le cadre des enquêtes. La FRA œuvre actuellement, avec le Conseil de l’Europe, à l’élaboration d’une note conjointe sur la protection des enfants migrants, y compris aux frontières.

Pourtant, des problèmes persistent en matière de législation, de politiques, de pratiques et de comportements dès lors qu’il s’agit de respecter et de protéger les droits humains et fondamentaux de tous les migrants et réfugiés, comme l’a souligné le directeur de la FRA au début de cette année dans son discours « People on the move ; their rights - our future » (Personnes en mouvement ; leurs droits - notre avenir).

Il s’agit notamment du respect des obligations internationales de sauver des vies ; de l’accès à l’asile dans l’ensemble de l’UE ; des voies légales d’accès pour les personnes ayant besoin d’une protection ; et des violations des droits fondamentaux aux frontières.

Les institutions nationales de défense des droits de l’homme, la société civile et les organisations internationales continuent toutes de signaler des violations récurrentes et systématiques des droits fondamentaux aux frontières extérieures de l’UE. La surveillance de ces violations doit donc être renforcée. Elle doit observer les orientations générales de la FRA, qui expliquent comment mettre en place des mécanismes nationaux indépendants pour contrôler le respect des droits fondamentaux aux frontières extérieures de l’UE.

Cette récente tragédie nous rappelle l’urgence de prendre des mesures concrètes. Se joignant à l’appel du Secrétaire général de l’ONU en faveur d’une enquête rapide et approfondie sur cet incident, la FRA appelle également à la mise en œuvre des trois grandes actions suivantes :

Premièrement, sauver des vies en mer grâce à des protocoles de recherche et de sauvetage (SAR) plus efficaces

Le droit à la vie est l’un des droits humains les plus fondamentaux. Dans le contexte maritime, il a été codifié par le devoir de porter assistance aux personnes en détresse en mer et par les obligations de recherche et de sauvetage.

Les navires appartenant à des entités publiques et privées ont le devoir de venir en aide aux personnes et aux embarcations en détresse en mer. Les navires commerciaux, comme les bateaux de pêche, devraient également être soutenus pour contribuer à sauver des vies. Des projets pilotes nationaux pourraient être mis en place afin d’étudier la manière dont cela pourrait fonctionner dans la pratique.

Les recherches et les sauvetages en mer doivent être plus efficaces pour éviter des tragédies comme celle qui vient de se produire.

Cela peut se faire en améliorant les protocoles de recherche et de sauvetage qui, dans leur pratique actuelle, prévoient une interprétation trop stricte de ce qui constitue une situation de détresse, comme la FRA l’a déjà souligné en 2013 en examinant les conditions aux frontières maritimes méridionales de l’Europe.

Deuxièmement, protéger les survivants de naufrages et les reconnaître en tant que victimes

La protection des survivants de naufrages devrait être mieux ancrée dans le droit de l’UE en matière d’asile et de migration.

Les survivants de naufrages ont des besoins spécifiques. Dans la plupart des cas, ils sont victimes de la criminalité et, en tant que tels, peuvent prétendre aux droits à la protection des victimes. Et, bien entendu, il existe des besoins psychosociaux et médicaux auxquels il convient de répondre.

La législation grecque cite explicitement les survivants de naufrages comme l’une des catégories de personnes ayant des besoins spécifiques nécessitant une attention particulière.

En vertu de la législation de l’UE en matière d’asile, la liste ouverte des catégories vulnérables de personnes ne fait pas explicitement référence à ces derniers, ce qui peut avoir pour effet de leur accorder une priorité moindre. Il pourrait être envisagé de mentionner explicitement les survivants de naufrages en tant que catégorie spéciale de personnes ayant besoin d’un soutien ciblé, également dans le droit de l’Union.

Cela serait particulièrement important à l’heure où des discussions sur des procédures plus strictes aux frontières pour les demandeurs d’asile sont en cours.

Il existe un impératif de protection pour traiter les survivants de naufrages dans le respect de la dignité humaine, en fournissant les soins nécessaires, y compris les soins psychosociaux, et en permettant l’identification des membres de la famille décédés. Les futures procédures aux frontières de l’UE doivent tenir compte de ces éléments.

Troisièmement, offrir des voies légales d’accès aux personnes qui ont besoin d’une protection

Il est nécessaire d’offrir un véritable accès à l’asile dans l’ensemble de l’UE et des voies légales d’accès aux personnes ayant besoin d’une protection, afin d’éviter qu’elles n’aient recours à des passeurs.

« Le respect de l’engagement à élargir et diversifier les voies d’accès à des migrations sûres, ordonnées et régulières est essentiel pour prévenir et traiter les vulnérabilités tout au long du parcours migratoire », a souligné António Guterres, secrétaire général de l’ONU.

En outre, cela ferait du droit d’asile, protégé par l’article 18 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, une réalité pour les réfugiés et les autres personnes ayant besoin d’une protection séjournant dans un pays tiers, et dont la sécurité est souvent menacée.

Dans cette optique, les pays de l’UE peuvent s’inspirer de bonnes pratiques telles que l’initiative des couloirs humanitaires. Il s’agit d’un programme sûr et légal de transfert et d’intégration en Europe de personnes vulnérables, telles que des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées fuyant la guerre en Syrie et les conflits au Liban, au Soudan, en Érythrée et en Somalie.

Face à l’ampleur des défis et à leur incidence sur le bien-être humain, ces propositions doivent s’accompagner d’un investissement soutenu dans des politiques engagées à l’échelle mondiale.

Au bout du compte, une approche plus efficace et plus cohérente en matière de migration à l’échelle de l’UE permettra de sauver des vies et de libérer le potentiel que la migration peut indéniablement représenter pour l’Europe et son économie.